« La pandémie présente des répercussions sans précédent sur notre environnement bâti ; pas seulement ici au Royaume-Uni, mais également dans le monde entier. Mais je pense qu’il y a aussi du positif à en tirer. Cela nous incite à rechercher plus d’innovation et des solutions bien plus rapides. »
Prononcées lors de la récente Conférence virtuelle de LetsBuild par David Philp, Consultant en chef BIM/IM Monde chez Aecom et Directeur BIM au sein de la UK BIM Task Force, ces paroles décrivent parfaitement la situation que le secteur de la construction traverse actuellement.
Comme tout autre secteur dans le monde, la construction souffre de l’impact sans précédent de l’épidémie de coronavirus.
Cependant, avec le bon état d’esprit et la bonne stratégie, une formidable opportunité est offerte au secteur de faire d’une telle épreuve un catalyseur du changement. Il est capital de tenir compte de l’importante contribution du secteur de la construction au PIB de chaque pays, et de la place cruciale qu’il occupe dans nos sociétés.
En plein milieu de cette crise, il est bénéfique d’observer les initiatives que de nombreux acteurs de l’innovation dans la construction ont prises pour soutenir la bataille contre l’épidémie de coronavirus. Certains donnent des masques (parfois leur stock entier), d’autres mettent gratuitement des salles à disposition pour que les équipes soignantes se reposent près des hôpitaux, et font même de leur mieux pour ouvrir de nouvelles installations hospitalières avant la date initialement prévue.
Par-dessus tout, n’ignorons pas que les structures bâties constituent un élément central de notre quotidien, qu’il s’agisse de maisons, d’écoles ou d’hôpitaux.
Sachant tout cela, il apparaît clairement que la construction ne peut se permettre de ne pas exploiter cette crise. Il est temps pour le secteur d’accélérer sa transition numérique pour accompagner un futur fait de situations de crise, comme celle que nous connaissons aujourd’hui. En d’autres termes, la prochaine grande mission pour la construction est de trouver les moteurs culturels qui permettront de débloquer une nouvelle façon de travailler et de communiquer. Car la normalité n’est plus un état souhaitable pour le secteur.
« Les sociétés les plus innovantes et qui investissent le plus auront beaucoup à gagner. Je pense qu’elles le feront. Je pense que la crise accélérera la transformation et la transition. Et je pense que des portes ont été ouvertes par des gouvernements dans le monde entier pour changer les choses », a affirmé le Dr Jan Mischke, Partenaire au sein du McKinsey Global Institute, à la Conférence virtuelle portant sur les conjectures relatives à l’influence de l’épidémie de coronavirus sur le futur du secteur de la construction.
Jan Mischke est l’un des auteurs d’un article très pertinent, publié récemment par McKinsey & Company, qui traite des conditions dans lesquelles la construction sera capable de sortir plus forte de la crise du coronavirus.
Étudions aujourd’hui ce rapport de plus près afin d’examiner les tendances clés derrière ce changement pressant dans la construction, ainsi que les facteurs qui feront avancer le secteur vers une nouvelle normalité axée sur les données.
Certains feront face à la crise mieux que d’autres
Avant toute chose, il est déjà évident qu’il y aura des meneurs et des retardataires dans le secteur en matière de réponse à la crise du COVID-19. C’est une chose que nous avons déjà constatée il y a quelques années lors de la crise financière mondiale.
« Comme toujours, un recul dans la construction représente à la fois un défi et une opportunité. Et je pense que nous devons le voir sous cet angle, en termes de choix à faire par les entreprises », a expliqué Mark Farmer quand la question lui a été posée lors de la récente Conférence virtuelle.
Et d’ajouter :
« Malheureusement, je suis à peu près certain que la reprise que nous allons observer se manifestera par des comportements et réponses probablement divers. Nous allons voir des entreprises sortant tout droit d’un mode de survie, ce qui ne peut leur être reproché. Parce qu’en fin de compte, elles seront contraintes par la nécessité de maintenir leur activité sur les rails. Mais cette survie est une question de vision à court terme, qui reviendra à cesser tout investissement potentiel qu’elles faisaient dans l’innovation, peut-être même dans la technologie ; tout ce qui, potentiellement, contribuera à la solution pour avancer. »
Donc dans de nombreux cas, les acteurs de la construction devront faire un choix difficile entre investir dans leur survie à court terme ou dans leur développement dans la durée. Cette idée, également soutenue par McKinsey & Company, est illustrée par le schéma suivant :
À quoi la construction ressemblera-t-elle durant et après le COVID-19 ?
La pandémie de coronavirus a placé les personnes face a une nouvelle réalité, d’un point de vue personnel comme professionnel. Le secteur de la construction n’y fait bien sûr pas exception. Une nouvelle réalité émerge progressivement non seulement dans la manière dont les parties prenantes du secteur vont construire mais, plus important encore, dans leur manière de collaborer et de partager les informations critiques.
McKinsey & Company a analysé en détail certaines des principales tendances dont l’apparition est prévue ou déjà observée dans le secteur. Les acteurs de la construction doivent être attentifs à des changements à court terme et à long terme à mesure que les chantiers de construction rouvriront et que les opérations de terrain retrouveront du rythme.
À court terme
Pour commencer, les tendances à court terme que l’on prévoit marquantes dans la construction peuvent être résumées comme suit.
Un soutien accru aux initiatives numériques
De plus en plus de sociétés de construction réinventent leurs systèmes et processus, et essayent d’accélérer leur passage au numérique. L’un des principaux facteurs de cette profonde mutation numérique est leur besoin de soutenir une stratégie efficace et simple de travail à distance, dont la popularité est en augmentation constante chez les concepteurs, ingénieurs, managers de projet, etc. Il est prévu que les technologies telles que la modélisation des données du bâtiment (BIM), les logiciels de gestion de projet et les applications de gestion des flux de trésorerie occupent une place croissante dans le secteur au fil du temps.
De nouveaux objectifs pour les chaînes d’approvisionnement
Un changement dans la manière dont les chaînes d’approvisionnement planifient le futur est apparu. De plus en plus d’entrepreneurs privilégient l’adaptabilité plutôt que l’efficacité. Par exemple, ils investissent dans la constitution d’un inventaire résilient et acquièrent du matériel d’une importance cruciale pour préserver leurs projets. De plus, de nombreuses organisations recherchent d’autres fournisseurs pour éviter les pénuries de matériel dans un futur proche.
À long terme
En ce qui concerne les effets à long terme, le tableau demeure un peu plus flou mais certaines tendances incontestables qui méritent d’être mentionnées ont commencé à émerger.
La consolidation prend de l’ampleur
De plus en plus d’acteurs de la construction recherchent des opportunités de consolidation en vue de rester compétitifs et d’atténuer le risque. Davantage d’investissements dans l’acquisition de talents, dans la technologie et dans les activités de R&D participent également à cette évolution stratégique.
Accent sur l’intégration verticale
Comme le signale McKinsey & Company, un nombre croissant de sociétés du secteur de la construction recherchent une intégration verticale de sorte à pouvoir contrôler plus efficacement les coûts et le risque. On anticipe dans le secteur l’essor d’un certain nombre de modèles d’affaires nouveaux dans un futur proche.
La construction modulaire se fortifie
Être en mesure de développer et de mener à bien les projets dans un environnement contrôlé peut être, pour de nombreux entrepreneurs, la manière de repartir après l’épidémie de COVID-19. Cette approche monte constamment en puissance, car elle peut faire naître des modalités standardisées de conception, de collaboration et même de construction. De plus, l’établissement de meilleures mesures et règles de sécurité devient plus facile grâce au travail dans un espace sous contrôle, semblable à une usine.
L’innovation, objet d’une demande croissante
À mesure que les chantiers de construction rouvrent, les entrepreneurs doivent trouver des manières de faire travailler leurs équipes de terrain dans des conditions sûres et conformes aux règles de distanciation sociale. Le rapport McKinsey suggère à raison que cela peut représenter une pression plus forte sur le secteur compte tenu de la pénurie sérieuse de compétences à laquelle la construction fait face. Cela dit, des investissements audacieux dans les outils numériques sont nécessaires pour que le processus de construction devienne plus innovant, pour soutenir la productivité et assurer la poursuite des projets de construction malgré les restrictions imposées. Les systèmes d’automatisation et une approche plus standardisée des bâtiments devraient susciter plus d’intérêt au cours des mois et années à venir.
Le durable sous le feu des projecteurs
Lors de notre récente Conférence virtuelle, le Dr Jan Mischke a souligné la nécessité, pour les gouvernements comme pour le secteur de la construction, de se pencher sur le durable.
« Nous avons vu des gouvernements investir jusqu’à 25 % du PIB pour sauver, disons, 1 million de vies. N’est-il pas alors raisonnable d’envisager d’investir 2 % du PIB pour préserver l’environnement et 50 millions de vies ? »
Des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions de carbone et une stratégie générale favorisant un mode de vie plus sain, des matériaux et des conceptions durables soutenant ces concepts contribueront à la nouvelle ère de la construction.
Les facteurs clés du succès futur
Tous les points décrits précédemment démontrent avec force que le secteur de la construction peut espérer vivre des jours meilleurs si tous les acteurs restent ambitieux et planifient sur le long terme. Le secteur ne peut se permettre de ne pas exploiter cette crise et, plus important encore, il ne peut se permettre d’ignorer cette vue d’ensemble.
Mais que faudra-t-il pour que ce changement stratégique soit une réussite ? McKinsey & Company a identifié sept facteurs clés susceptibles de conduire progressivement la construction vers un futur prometteur. Brièvement, voici les mesures que toutes les sociétés de construction qui veulent réussir doivent prendre :
- Accélérer le développement et la mutation numérique ;
- Veiller à bâtir une culture compatible avec le changement ;
- Adopter un système de suivi efficace pour l’ensemble des projets ;
- Investir dans la résilience de la chaîne d’approvisionnement ;
- Réaffecter les ressources et le financement pour soutenir la nouvelle vision ;
- Explorer les opportunités de construction hors site ;
- Être plus connectées avec les clients.
En suivant quelques-unes (ou dans l’idéal, la totalité) de ces mesures, les acteurs de la construction ont de bonnes chances de rebondir plus fort une fois passée l’épidémie de coronavirus. Il va sans dire que c’est un processus long et exigeant mais, moyennant une stratégie, une culture et des investissements pertinents, la construction peut compter sur un avenir meilleur.
La transformation a déjà commencé
La nécessité d’un changement profond dans la construction était déjà plus qu’évidente avant l’épidémie de coronavirus. Une faible productivité, une forte culture des reproches, l’insuffisance numérique et de faibles marges composaient une réalité très problématique pour les parties prenantes du secteur.
Autrement dit, un retour à une nouvelle normalité était déjà la clé de l’avenir de la construction. Certains des acteurs les plus ambitieux et innovants ont vite compris cette tendance et changent de manière de travailler.
Mais une chose est sûre. Certaines sociétés accompliront cette mission ardue, et certaines échoueront. Personne ne saurait prédire l’avenir ou à quoi les choses ressembleront après la crise du COVID-19. La construction navigue encore à vue et personne ne possède la réponse.
Cependant, en tirant mutuellement parti de leurs connaissances et compétences, les acteurs de la construction peuvent travailler ensemble à offrir un avenir plus radieux à un secteur où la culture de la routine n’a plus sa place.
En vue d’aider à réunir les leaders d’opinion de la construction, nous vous invitons à rejoindre notre Conférence virtuelle, qui se tiendra le jeudi 28 mai à 11:00 heures, heure de Londres.
Nous avons rassemblé un impressionnant panel d’experts pour dresser un état de la situation actuelle dans le secteur et de ce qui se passera au cours des mois prochains : pourquoi certaines sociétés réussissent à surmonter les changements profonds, et pourquoi d’autres échouent.